Quoi ? : Danseuse
Un lien ? : Cliquez-ici

Elle est solaire, combattive, pleine d'énergie et hyper engagée. Elle secoue les fessiers de Marseille et d'ailleurs dans des soirées et des ateliers de danse Afrovibe survoltés. Bienvenue dans l'univers de Maryam Kaba !

Née à Vitry-sur-Seine, passée par Paris et Rio de Janeiro, ex-championne de France de GR, Maryam Kaba est arrivée à Marseille il y a quelques années. Avec son concept d’Afrovibe, mélange de fitness et de danses afro-descendantes, il n’a pas fallu longtemps pour qu’elle devienne la représentante locale d’un rapport au corps féministe, libre et joyeux. Quand elle n’est pas en train de faire des acrobaties dans une salle de danse, on peut la trouver en pleine animation d’un atelier d’Afrovibe (dehors ou dedans, tous les endroits sont bons pour danser), ou déchainée sur scène avec le collectif Maraboutage… Et depuis janvier 2023, elle a remis un pied dans le monde de la danse académique, puisqu’elle est artiste associée au Ballet National de Marseille pour deux ans. De la rigueur militaire de la gymnastique rythmique de son enfance à la liberté des corps qu’elle prône aujourd’hui, portrait d’une danseuse qui fait du bien aux corps et aux cœurs.

Comment est venue ta passion de la danse ?

J’ai grandi avec beaucoup de musique et de danse. Un peu de tout : mon père est de Côte d’Ivoire, mon beau père est sénégalais, et ma mère est du Tarn mais écoutait tout le temps Stevie Wonder, les Touré Kunda, elle adorait danser la rumba congolaise…

Moi, je faisais de la danse et je crois que ce qui me plaisait, déjà à l’époque, c’était d’exprimer par le corps ce que je n’arrivais pas à verbaliser.

J’avais beaucoup de colère et de tristesse, et c’est par la danse que je les ai extériorisées. Je suis entrée en sport-études gymnastique rythmique (GR) à 12 ans, et j’aimais le fait que ce soit cadré et compétitif : tu ne penses qu’à ça, tu refais sans cesse… C’est un cadre militaire mais c’est ce qui m’a donné confiance en moi, ce qui m’a appris à aller jusqu’au bout des choses. Je voulais gagner, et j’ai gagné !

Tu as été trois fois championne de France de GR (deux fois en individuel, une fois en duo). Pourquoi avoir abandonné ce monde académique ?

Après avoir fini sport-études, je ne savais pas quoi faire.

Je savais juste que la danse était la seule chose qui m’intéressait, et qu’il fallait que j’en fasse mon métier.

Mais quand tu viens de la GR, on te considère comme sportive, pas comme danseuse. J’ai donc essayé plein d’autres choses : j’ai fait STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives), j’ai passé un Brevet d’Etat d’éducateur sportif spécialité Activité gymnique, j’ai été entraineur de GR dans des clubs de haut niveau, j’ai fait des castings de danse, de pubs, j’ai été coach fitness dans les milieux de la mode à Paris… Parallèlement, j’ai commencé à m’intéresser à d’autres danses : notamment le hip-hop et l’afro-brésilien, pour lequel j’ai vraiment eu un coup de foudre. C’est suite à cette découverte qu’est venue l’envie d’inventer un sport mêlant danse et fitness. Avec une amie, elle aussi issue de la GR, on a eu l’idée d’Afrovibe en 2011. Ça s’est professionnalisé, et aujourd’hui on fait de la formation, des séjours, des stages, des Team building en entreprise et des événements engagés. On a 70 professeurs en France, à Amsterdam, en Guyane, au Brésil.

Comment définis-tu l’Afrovibe ?

L’Afrovibe, c’est une fusion. On s’inspire des danses africaines et afro-descendantes pour faire du fitness. L’Afrovibe combine chorégraphies, fitness et lâcher prise. Ce n’est donc pas une danse d’un pays particulier, ni un cours de technique : on travaille le cardio, les muscles de manière ciblée, en utilisant des mouvements issus de plusieurs de danses afro-descendantes.

 

Pourquoi cet attrait pour les danses afro-descendantes ?

J’ai eu ce coup de cœur quand j’ai découvert l’afro-brésilien. Mais je pense que ça vient aussi du milieu dans lequel j’ai grandi : j’ai baigné dans la musique et les danses d’Afrique de l’ouest, car mon père est ivoirien et mon beau père sénégalais. L’été, j’allais souvent au Sénégal ou en Côte d’Ivoire… Je pense que tout ça m’a influencée !

Tu dis souvent que tu adores enseigner – et d’ailleurs, ça se voit dans tes cours ! Qu’est-ce qui te plait ?

Aujourd’hui, je n’enseigne pas pour la performance. Je l’ai fait par le passé, et j’aimais ça, car je pense que les graines que l’on plante dans la danse académique ont du sens : on dit aux gamines que si on travaille assez, on peut avoir ce que l’on veut.

Mais l’Afrovibe, c’est différent : il n’y a pas d’enjeu technique, on vient pour oublier sa charge mentale. C’est une soupape.

La danse, bouger son bassin, se toucher, ça fait quelque chose de chimique : ça fait sécréter de l’endorphine, de la sérotonine. Ça développe l’amour de soi, l’acceptation de son corps, la souplesse, la coordination, la joie, ça vibre – et ça change ton quotidien et ta façon de penser. C’est ça que j’ai envie de transmettre : pour moi, danser c’est militer.

L’Afrovibe a d’ailleurs un côté très libre, sans tabous…

Oui, parce que j’estime que la société a rendu la normalité taboue : le gras, le cul, le sexe… Quand tu bouges le bassin, si tu es une femme tu es « une pute », si tu es un homme tu es « un PD ». Les femmes sont complexées, elles ont mal, elles ont de l’endométriose : je ne dis pas que c’est dans la tête, mais je pense que libérer la tête peut aider. On dit que le ventre est le deuxième cerveau, le bassin des émotions. Certains kinés disent même que la dépression se loge dans les fesses, car c’est là que s’accumulent des toxines…

Pour aller mieux, c’est donc dans le ventre et les fesses qu’il faut dénouer, faire trembler, vibrer, plier, rouler !

Tu es aussi très engagée politiquement. Tu fais régulièrement des soirées au bénéfice d’associations, notamment SOS Méditerranée, mais pas seulement. Quel lien fais-tu entre danse et politique ?

Je pense que l’esprit gouverne le corps, et que danser peut libérer les traumas. Ça a été mon cas : à un moment de ma vie, on ne m’a pas laissé la parole, et je pense que si je n’avais pas dansé, j’aurais implosé.

La danse aide donc à aller mieux et je pense qu’une fois que tu vas mieux, tu te comportes mieux avec les autres.

En ce sens, danser, c’est rendre la société meilleure. Mais je pense aussi que l’énergie collective qui se créé quand tu fais danser ensemble des gens – des réfugiés, des collaborateurs, des gens qui ne parlent pas la même langue ou qui ne se connaissent pas pendant une manifestation – ça fait passer des messages, des idées. Ce n’est pas pour rien que tous les dictateurs organisent des parades ou des défilés !

Tu as passé quatre ans au Brésil, et ça a été un déclencheur personnel et professionnel. Qu’est ce qui t’es arrivé là-bas ?

Je suis partie juste après avoir lancé Afrovibe et là-bas, tout est arrivé à moi. Au début, j’ai juste récupéré une petite enceinte et j’ai donné des cours d’Afrovibe à Ipanema, sur la plage. Assez vite, il y a eu plus en plus de monde, et je suis devenue Nike Trainer. J’ai vendu mon âme au diable, mais à l’époque, franchement, j’en avais besoin… Je faisais aussi des publicités, j’ai été directrice artistique pour des clips, j’ai dansé sur scène. Et surtout, en 2017, j’ai défilé au Carnaval de Rio : j’ai été la danseuse principale de la “Comissao de Frente” de Vila Isabel, un groupe de danseurs professionnels qui ouvrent le défilé.

Au Carnaval de Rio, j’ai dansé devant 80 000 personnes en furie, j’ai eu le choc d’adrénaline le plus dingue de ma vie !

Ces quatre ans au Brésil m’ont permis de reconnecter avec la joie et une autre manière de vivre. J’en garde mon mantra d’aujourd’hui : vibrer et cultiver la joie par la danse, le partage, les potes.

En revenant de Rio, tu as décidé de t’installer à Marseille. Qu’est ce qui t’a séduite ?

Ici, il y a les calanques, la nature, les cagoles, les gens qui parlent fort, le mélange, la mixité, le port, l’Algérie… Marseille c’est Rio, c’est la ville Carioca de la France ! Et bien sûr, il y a la mer : je pense que la mer guérit tous les maux.

Tu fais aussi partie du collectif Maraboutage…

On s’est rencontrés sur un projet lié à SOS Méditerranée. Ils m’ont invitée à l’une de leurs soirées. Et quand je suis arrivée… C’était la folie !

Des gens dans tous les sens, certains allongés sur la table du DJ, la transpiration, le lâcher-prise total.

Je suis une grosse fêtarde, mais là, on était dans un autre bail, je ne pensais pas retrouver à Marseille des fêtes comme à Rio ! Il y avait le son, mais aussi le public : de l’amour, de la bienveillance, de l’authenticité. La Famille Maraboutage, c’est ça : nos soirées commencent par un manifeste qui impose bienveillance, respect. C’est ça que j’aime, car je pense que c’est comme ça que tu changes les gens !

Aujourd’hui, quels sont tes projets ?

Je continue à donner des cours d’Afrovibe, je continue avec le collectif Maraboutage, je continue aussi à soutenir des associations. Et l’un de mes gros projets 2023, c’est que j’ai été invitée à être l’artiste associée au Ballet National de Marseille (BNM), pendant deux ans. Concrètement, j’ai carte blanche pour faire des créations et co-créations artistiques, et des actions culturelles sur le territoire. L’objectif, c’est d’ouvrir le BNM, de ramener des gens, d’engager les publics. Je ne peux pas dévoiler mes idées, mais le BNM veut quelque chose de joyeux et festif. Et ça, en général, je sais bien faire !

Quels sont tes lieux coup de cœur à Marseille ?

Pour sortir : les soirées Maraboutage, la Rasputin ou la Boum au Makeda, les soirées Tue l’amour, Dancefloor Marseille chez Coco Velten, Couz’In, soirées Cagole Nomade, les soirées de Matteo et Chinese man.

Pour manger, boire un verre ou un café : La Touf Pwélé, Il Caffé, Bambino,  Golda, Bar à Pain, La Cabane, Baan Thai, Maison M&RLe Grand Bar des Goudesmanger des chichis à l’Estaque, Le Vivier, A MoroLa Dame du Mont pour les cocktails, les bars de quartiers genre Le Score, Café debout, Le Welcome aux Catalans…

Pour se balader : la Corniche, la Calanque du belge, Niolon, la Baie des singes, le chemin du Bois sacré, le Frioul…

Propos recueillis par Julie Desbiolles
Photos : couverture JD / 1 : @jmranaivoson @justinefv.creation / 2 :  @swannfy @grandmediumstudio / 3 : @youri.mege /4 : @villanoailles / 5 : DR / 6 : @jmranaivoson @justinefv.creation / 7 : DR / 8 : @villanoailles / 9 : @jmranaivoson @justinefv.creation 

 

Plus d’infos sur Maryam Kaba

_ Cours d’Afrovibe par Maryam Kaba les mardi à 19h à Coco Velten
_ Cours de Pilate-fusion par Maryam Kaba le jeudi à 12h15 au Centre social Cours Julien
_ Cours et formations d’Afrovibe en France (Paris et Marseille) : consulter le site
_ Page Facebook du Collectif Maraboutage
_ Quelques cours en ligne sur Zen by Deezer
_ Et pour se mettre dans le bain, la playlist Afrobvibe !