Les arts forains et du cirque font intrinsèquement partie de l’histoire du Mucem qui en possède l’une des plus belles collections au Monde. Macha Makeïeff et Vincent Giovanni ont pioché dans ses réserves pour replacer les trésors du genre au cœur d’une exposition touchante d’humanité dans laquelle chacun pourra refaire son propre spectacle. En piste !
Le Musée des arts et traditions populaires – devenu Mucem en s’installant à Marseille il y a 10 ans – a fait rentrer dans ses collections des marionnettes dès les années 30. Il a intégré dans son fonds les Arts du cirque dès les années 50 et ensuite l’Art forain. En cela, il est un musée pionnier dans la conservation de leurs objets qui ont inspiré les commissaires de cette nouvelle exposition.
« Le regard qu’a apporté Macha Makeïeff sur ces objets est très importan car il les anime et les fait revivre. En les découvrant, on voit quasiment les hommes et les femmes qu’ils habillaient ou accompagnaient » déclare Pierre-Olivier Costa, directeur du Mucem.
L’exposition-spectacle qu’elle a imaginée transporte en effet les visiteurs dans une scène onirique peuplée de clowns, saltimbanques et de souvenirs d’anciens spectacles. Entre fragilité et fantaisie, elle mêle reliques foraines et créations artistiques dans un univers à la fois lumineux et mystérieux.
Les œuvres y flottent, paradent ou s’exposent avec poésie et le rêve se mêle au réel. C’est un hommage vibrant et colorée à la vie vagabonde et à l’art forain, conçu comme un récit sensible et immersif.
« Il est question de déambuler dans un spectacle immobile. Un vestibule de bonimenteur, une nef, ses pistes, ses recoins, cagibis et cabane » nous explique Macha Makeieff.
La célèbre metteur en scène et ancienne directrice de la Criée met à profit toute son expérience des planches pour redonner vie aux souvenirs de spectacles, même les plus prosaïques.
Elle replace costumes, perruques, accessoires et maquillages, roulottes ou la loge des comédiens dans une perspective quasi mystique et s’interroge sur l’au-delà : que deviennent-ils une fois le spectacle des clowns, pitres et saltimbanques terminé ?
« J’ai fui la simple juxtaposition d’objets pour une zone qui tient du théâtre du spectacle forain, de ses attractions éphémères, une fois que la fête est passée (…) Où vont les spectacles disparus? »
L’hommage à la figure du saltimbanque est replacé dans l’histoire de l’Art où elle a enfin sa place, non plus reléguée à un simple divertissement.
Le célèbre portrait de Joaquín Salvado en Arlequin peint par Picasso en 1923, côtoie une sculpture de Niki de Saint Phalle, les films de Jacques Tati, les costumes des ballets russes ou bien encore la roulotte de Bartabas.
« L’accrochage d’œuvres de grands artistes joue le jeu du forain. Ces artistes accueillis, fêtés, prolongent le mystère. » (MM)
Prêtées par le musée d’Orsay, le centre Pompidou, le Mamac, le musée Picasso, le nouveau musée national de Monaco, le musée national Fernand Léger, et bien d’autres, les peintures célébrant les figures des clowns, pitres et saltimbanques telles que représentés en art depuis le 19ème siècle offrent une nouvelle lecture.
Macha Makeieff n’oublie pas néanmoins ses contemporains comme Gérard Traquandi qui réalise pour l’exposition 32 aquarelles inédites ou le jeune peintre Felix Deschamps Mak, qui clôt cette exposition-spectacle par un très beau tableau baptisé « Circus ».
« Et puis un soir c’est la dernière, plus jamais n’aura lieu le spectacle. Où va-t-il, à quel purgatoire, quel paradis d’images, Où vont les aveux des saltimbanques, la vie transitoires des pitres et des idoles. » (MM)
Le Petit Plus : Comme à son habitude, le Mucem n’oublie pas les plus jeunes avec des cartels à leur hauteur. Les adultes souhaitant regarder l’exposition avec des yeux enfants pourront bien évidemment aussi les parcourir 😉
Par Eric Foucher