Artiste invité du Mucem, Mohamed El Khatib raconte à travers des films, photos, texte et installations la transhumance estivale des communautés maghrébines vers le Bled au Maroc ou en Algérie. Les mythiques Renault 12 et Peugeot 504 deviennent le théâtre de ces migrations où se mêlent traditions et modernité, religion et envie d’émancipation.
C’est une R12 entourée de tapis qui vous accueille dans le Hall du J4. En clin d’œil aux « voitures cathédrales » ces véhicules chargés à bloc à l’intérieur comme sur le toit en partance pour le bled, l’artiste Mohamed El Khatib a travaillé avec le CIRVA pour transformer les vitres du véhicule en vitraux.
« Ces voitures ont été pendant des décennies les traits d’union entre les deux rives de Méditerranée ».
L’artiste invité du Mucem a décidé de s’en servir comme motif pour son exposition-installation. Ces voitures vous embarquent à bord pour des récits de migrations et de tout ce qu’ils charrient d’objets, de souvenirs et d’émotions, lors de ces longs voyages qui duraient de 2 à 3 jours dans le meilleur des cas, selon que les familles venaient du Nord ou du Sud de la France.
Dessinateur industriel Robert Broyer qui a 87 ans a été convié à participer au projet, n’avait sans doute pas imaginé que pendant plus de 50 ans, le véhicule familiale et populaire qu’il avait dessiné pour Renault deviendrait un tel objet de fierté devant lequel on pose et devient le bien le plus précieux.
Qualifié de « Reine », « Chameau mécanique « , la 504 est pour l’un des protagonistes du documentaire réalisé avec Yohanne Lamoulère un chef d’œuvre. « J’espère qu’elle sera inscrite au patrimoine de l’Unesco ». Pour un autre, la 504 fait partie de la famille « comme ma femme, mère, mes enfants ».
A chaque famille ses souvenirs de ces pèlerinages ou des anecdotes drôles (Les K7 de chants traditionnels qui succèdent à la variété française une fois au Magreb) succèdent des histoires plus tristes (tracasseries douanières, racisme, accidents).
Sur la Place d’armes du Fort Saint Jean sont alignés 6 véhicules qui déclinent chacun un des aspects particuliers revêtu par ces véhicules.
Transformés en cinéma comme dans le Rif Marocain, customisés en discothèque, débordants d’affaires à convoyer que les passagers ne peuvent à peine y trouver place (les « mille-feuilles ») pour d’autres, le public est invité à y prendre place.
L’artiste en offre même une avec une clef cachée dans l’un des coffret de l’exposition (en tissu polypropylène typique) contenant photos, stickers, manuel, carte routière et livret photos de l’expo.
Mohamed El Khatib déconstruit littéralement le mythe de ce véhicule et du voyage qu’il implique sur le principe de de la casse automobile.
Il transforme les pièces détachées (volant, bougies, moteur) comme les artefacts traditionnels qu’il apportait ou rapportait (parfumeur d’intérieur « rêve d’or », tapis de prière, main de fathma) en vitrine d’un art contemporain populaire et lourd de sens.
Le Petit Plus : Des spectacles et deux séances de ciné-concert ont lieu 29 et 30 septembre à 20h15 sur la place d’arme avec le groupe Benzine et son synth-raï hypnotique puis Mehtoze, DJ qui mêle les musiques traditionnelles et contemporaines du Maghreb.