Khéops, Néfertiti, Toutankhamon et Cléopâtre... Quelques rois et reines de l’Égypte ancienne sont devenus de nos jours des icônes. D’autres figures comme Téti, Sésostris Nectanebo, plus importantes à leur époque ont sombré dans l’oubli. Entre histoire et mythes, ce parcours mène le visiteur sur plus de 5000 ans à travers l’histoire, la redécouverte et l'héritage laissé dans la culture contemporaine par des pharaons devenus des superstars.
Cette exposition, initialement prévue au Mucem pour l’été 2020, avait dû être ajournée en raison des circonstances que nous connaissons tous. Elle n’en était que plus attendue.
Un temps que les commissaires d’exposition ( Frédéric Mougenot et Guillemette Andreu-Lanoë) ont pu mettre à profit pour se faire prêter de nombreuses pièces venues compléter le fonds du Mucem provenant entre autres du musée du Louvre (Paris), de la Bibliothèque nationale de France (Paris), du British Museum (Londres) ou encore du Musée Calouste Gulbenkian (Lisbonne) où l’expo voyagera à l’automne.
L’expo est organisée en trois sections qui seront facilement identifiables par le visiteur grâce à une couleur différente propre à chaque univers.
La première se concentre sur les 3000 ans d’histoire de cette civilisation. Une ère très longue, puisqu’il s’est écoulé plus de temps entre le règne de Khéops (2635-2605 avant JC) et celui de Cléopâtre (51-30 avant JC) qu’entre le règne de cette dernière et nous !
On y découvre les missions assignées à tout bon roi : adorer les dieux et défendre l’Égypte et si possible étendre l’empire par des velléités guerrières.
On y apprend aussi l’importance d’édifier des temples, pyramides et colosses pour y graver son nom pour la postérité. Des rois aujourd’hui très connus comme Toutânkhamon ont fait partie d’une liste de rois maudits dont les contemporains ont voulu supprimer toutes traces, comme en témoignent de nombreuses statues brisées, exhumées par des archéologues.
Dans la deuxième section, la pierre et le bronze laissent leur place au bois et à la peinture dans l’univers des Beaux-Arts. On s’attache à l’Histoire et aux légendes qu’ont laissé les Pharaons depuis le Moyen-Âge jusqu’aux découvertes archéologiques majeures, en passant par les premiers déchiffrements des hiéroglyphes par le français Champollion après les épopées napoléoniennes et la naissance de l’égyptologie.
Rapidement l’orient des pharaons se résume à des codes emblématiques – grosso modo des palmiers et des pyramides – facilement reconnaissables dans la peinture classique. Des réputations se construisent, parfois antinomiques, selon que l’on se trouve en occident ou en orient. L’exemple de Cléopâtre est le plus significatif. Séductrice libidineuse chez les premiers, elle devient une reine savante dans le monde arabe.
La troisième section analyse le retour de l’image du pharaons dans nos sociétés modernes. Qu’en est-il de l’interprétation laissée dans nos sociétés contemporaines ? Jusqu’il y a peu, on ne faisait bien souvent que réinterpréter de façon moderne les mythes et fantasmes (celui du harem en tête) dépeint dans la littérature et la peinture romantique. C’est Ramsès II qui ressort le premier des oubliettes de l’histoire. Hollywood et les Dix Commandements où Yul Brynner interprète avec brio le Pharaon face à Moise y sont pour beaucoup.
Mais à l’aune des mouvements de libération post-coloniaux, des thèses afro-américaines défendent la cause de pharaons noirs, tordant le cou à l’imagerie véhiculée jusqu’alors.
Plus près de nous, l’image s’est paradoxalement scindée en deux. En Égypte durant le printemps arabe, le terme « pharaons » a repris le sens de tyran et d’impie, comme il a pu l’avoir dans la Bible et le Coran, et fut scandé par les manifestants hostiles à Hosni Moubarak.
Outre l’atlantique, le pharaon est au contraire devenu une icône pop principalement dans les musiques afro-américaines (Rnb et Hip-hop en tête) qui ont puisé abondamment dans son imagerie pour leurs clips, tenues et shows.
Dans les Années 60, le réformateur socialiste Nasser fut soucieux de promouvoir une identité égyptienne qui soit fière de ses racines après la période coloniale. Voiture Ramsès, moto Khéops, cigarette Cléopâtre, Machine Nefertiti, les grands noms de l’antiquité furent convoqués pour redorer le blason de la fierté nationale.
Le Petit Plus : L’exposition propose dans chaque pièce des modules ludiques et des vidéos animées à destination des enfants dont beaucoup sont traduits en braille.
Par Eric Foucher
https://youtu.be/myy8s3Ic8e8