Élève de Bourdelle, consœur de Giacometti, Germaine Richier n’a jamais eu connu la gloire de ceux-ci malgré sa passion dévorante pour la sculpture. Une très belle exposition présentant son bestiaire tourmenté lui rend enfin hommage dans cette Provence qui l’a vu naître et grandir.
Chaque année depuis 8 ans Eric Touchaleaume nous gratifie d’une exposition collective de 3 ou 4 artistes venant enrichir la collection permanente du Parc de Sculptures de la Friche de l’Escalette.
Cette année, une seule artiste est à l’affiche mais pas des moindres. Élève de Bourdelle et grande figure de la sculpture au 20ème siècle, la provençale Germaine Richier occupe la plupart des espaces, ainsi que les nouvelles salles intérieures amenées dans les années futures à devenir le restaurant du site.
« Le parti pris de départ de cette exposition est de révéler le caractère merveilleux du monde de Richier, imprégné de réminiscences de son enfance provençale, en présentant quelques-unes de ses œuvres en osmose avec la nature des calanques » déclare-t-il en préambule du catalogue de l’exposition.
Dans les espaces à ciel ouvert de l’ancienne usine de plomb comme dans l’ancien réfectoire réhabilité en salle d’exposition on découvre un large corpus de ses statues. Hybridation de formes humaines et animales avec la nature, elles nous initient au mystère de ses créations dont les forces telluriques semblent immédiatement palpables.
« Devant une sculpture de Richier, tu sens que c’est interne, exactement, comme devant une personne vivante » disait César qui vénérait son aîné.
Il y effectivement un effet d’attraction mêlé de crainte à la vue de ces créatures étranges parfois privées de têtes, et aux pattes qui s’étirent interminablement.
La Mante, grande (1946) qui influence l’ Araignée de Louise bourgeois (qu’on peut voir au Château la Coste) exprime bien cette « violence contenue exprimée par les tensions du modelé, quelque chose de fragile et de puissant, de vivant et de morbide qui nous tient à distance ».
Devant le bronze nommé « Torse 1 » le critique et historien d’art Pierre Restany dira : « Ses aînés, Rodin et Bourdelle, lui ont légué le sens profond impératif de la statuaire, le sens de l’effigie, de l’attitude du positionnement dans l’espace, de l’aplomb vertical du personnage, la monumentalité organique de la statue »
« Plus encore que méridionale, l’œuvre est méditerranéenne : lorsqu’elle nous émeut le plus, c’est peut-être qu’elle s’accorde au-delà du bruissement d’élytres et des midis odorants aux rythmes profonds d’une latinité retrouvée » conclut Michel Conni-Lacoste.
Allez voir cette exposition où les bronzes sont merveilleusement mis en valeur. Amenez-y vos enfants qui ne manqueront d’être intrigués par ces créatures fantastiques.
Le Petit Plus : dans le Bungalow du Cameroun (1964) présent dans la cour vous découvrirez les dernières trouvailles du collectionneur Eric Touchaleaume (statuettes, céramiques, mobiliers, etc.