L’artiste JR travaille sur le thème du voyage, de la migration depuis plusieurs années. Avec Amor Fati, il propose cependant un dispositif inédit et bien différent de ses autres projets. Dans le hangar J1, il vous invite à embarquer pour faire votre propre traversée de l’autre côté du miroir.
L’expérience participative commence par un photomaton qui va vous tirer le portrait (enfin plutôt le regard). Sauf qu’au lieu de l’afficher sur un mur, un container ou un autre support comme dans les projets précédents de l’artiste, on vous invite à plier cette feuille en origami (format A3 environ) pour en faire un petit bateau (rassurez-vous des petites lignes vous guident dans le pliage qui n’est pas un jeu d’enfant pour tout le monde 🙂
Changement d’échelle donc, puisque c’est à ce petit bateau de papier (allégorie d’un regard d’enfant ?) que vous allez proposer un voyage.
Vous pourrez ensuite poser votre frêle embarcation sur l’eau et la regarder divaguer depuis les passerelles chevauchant toute l’installation. Ces dernières sont familières à l’artiste. Ce sont celles qu’il utilise pour coller ces collages géants dans la rue mais aussi une sorte de copie de celles qu’empruntent marseillais et visiteurs qui prennent la mer et débarquent dans le port. Elles surplombent un miroir liquide à la fois sombre comme une mer de pétrole et lumineux comme les reflets de la lune sur la mer, brillant reflet nos espoirs et de nos désillusions.
Certains y verront un écho à la tragédie des migrants en Méditerranée (Ndr : JR rappeler lors de la conférence de presse l’épisode duPorte- conteneurs affichant des portraits géants de migrants qui détourné sa route pour secourir une embarcation en méditerranée comme une ironie du sort). D’autres un voyage plus mystique, introspectif, guidé par le lumière venant de cette fenêtre ouverte sur la Méditerranée.
Amor Fati (l’amour du destin) comme acceptation d’une certaine destinée qui nous échappe ? Rien n’est figé et l’œuvre, à la beauté visuelle magnifiée par un superbe écrin industriel (le débarcadère historique du J1) se garde bien ne nous donner des réponses figées. Elle invite au contraire le public à faire sa propre traversée.
Le lien avec les autres projets ? La photo initiale qui n’est pas la fin mais le prétexte à la rencontre, au dialogue et au partage entre les acteurs (ici le public) « Souvent mon travail n’est qu’une excuse pour recréer du lien physique entre les gens ».
Par Eric Foucher