L’artiste belge SPYK vient de sortir de trois mois de création dans un ancien moulin de Marseille avec la Galerie Diego Escobar. Il présente le fruit de cette résidence inspirée avec une exposition inédite intitulée « Vestiges ».
L’année 2024 marque une nouvelle étape pour la galerie Diego Escobar avec l’inauguration de la résidence d’artistes, accueillant pour la première édition le belge Christophe Lequarre alias SPYK.
Depuis le mois d’août, l’artiste a investi un ancien moulin du quartier des Chutes-Lavie à Marseille. Plus de 300 M2 à la disposition de ce maestro de la bombe pour installer ses châssis et disposer sur des tables toutes ses palettes chromatiques en spray.
Une espace unique et une parenthèse longue de création dans un vie qui va trop vite pour approfondir des recherches sur les jeux de lumières et les textures qu’il mène depuis 25 ans.
Le jeune homme découvre le graffiti lors d’un voyage à New-York en 1990. Une grande claque visuelle qui le conduit à poser ses premiers blazes dès son retour à Liège.
« J’ai toujours gardé le nom SPYK, un blaze qui sonne bien mais les pires lettres pour une approche graphique facile » sourit-il.
Il devient très vite une figure de l’art urbain. « J’ai fait plein d’écoles mais je n’ai aucun diplôme. C’est seulement le graffiti qui m’a aidé à canaliser mon énergie. »
Au tournant du nouveau siècle, un galeriste l’invite à exercer son art unique de la bombe aérosol sur des toiles.
« Je viens du graffiti mais quand je suis passé à autre chose, j’ai voulu réunir mes trois passions : les voyages, la photo et la peinture ».
Son travail de plus en plus précis et fin offre à ses peintures un rendu hyperréaliste comme chez Edward Hopper un peintre qu’il admire.
« Je trouvais intéressant que le grain que laisse le spray aérosol se rapproche du grain de la photo argentique. J’ai aussi gardé ce goût de l’Urbex qui consiste à aller explorer des lieux abandonnés pour les décors de mes toiles »
Au fil des années, Spyk a affiné son style artistique, qui est devenu sa signature unique. Après vingt-cinq ans de pratique, son art est à la fois plus précis et plus sophistiqué, mais c’est avant tout sa technique singulière qui le distingue.
La lumière, qu’elle soit naturelle ou artificielle, joue un rôle essentiel dans ses œuvres, leur donnant une profondeur et un réalisme frappants.
L’originalité de son travail réside dans l’absence de personnages. Spyk préfère explorer les émotions et les sensations que dégagent les décors et paysages qu’il crée. Il nous invite à entrer dans le silence, à ressentir la pluie illuminée par des néons, à découvrir des atmosphères feutrées d’hiver, ou à plonger dans des ambiances nocturnes et artificielles, inspirées de son imaginaire influencé par le cinéma américain.
« The end » le nom de l’un des tableaux semble assez prophétique. « C’est un peu le thème de l’expo. C’est très symbolique » déclare-t-il.
« On est sur une route mais on ne sait plus trop où elle nous conduit. On va dans une direction où l’on perd de plus en plus l’humain et le physique. Ces vieilles stations-service à l’abandon que j’ai pris en photos aux Etats-Unis peuvent paraître anodines mais elles expriment cela, ce que sont devenus ces lieux de rencontres et de vie ».
L’exposition « Vestiges » à la Galerie Diego Escobar de Marseille est le dernier solo show de l’artiste avec une grande rétrospective en 2025.
Quelle sera la suite ? L’artiste ne le sais pas lui-même. Seule certitude : le fait de vivre les choses par ses créations plutôt qu’être un spectateur du monde.
« Je pense qu’à un moment on va revenir en arrière, se régénérer. L’être humain à besoin de ressentir des choses et ne pas voir tout canalisé par le numérique. »
Par Eric Foucher / texte et photos