Cette exposition partagée entre le Musée Cantini et le Chateau Borely permet de découvrir une facette méconnue de Man Ray qui figea à merveille tout le raffinement et la beauté des créations et modèles des grandes maisons de couture de l’époque dans un style novateur, inspiré du surréalisme.
La Mode a bien changé, ma bonne dame et pourtant de nombreuses maisons de couture avec lesquelles Man ray a collaboré renaissent de leurs cendres grâce à des investisseurs qui misent sur la désirabilité éternelle de ces noms mythiques. C’est notamment le cas pour Carven, Poiret, Patou et Schiaparelli qui reviennent depuis peu sur le devant de la scène. A l’époque, ces maisons de couture étaient florissantes et occupaient les pages des journaux de mode comme Vogue, Harper’s Bazar ou Vanity Fair.
C’est de façon fortuite que Man Ray devient photographe de Mode. Membre actif du groupe dadaïste, c’est sur les conseils de son ami Marcel Duchamp qu’il quitte New York au début des années 20 pour rejoindre Paris. Portraitiste de talent, il est encouragé par Paul Poiret à collaborer avec les revues et magazines de mode.
C’est avec un regard neuf que Man Ray aborde la photographie de mode. Il renouvelle ainsi le genre en faisant preuve d’une inventivité très osée à l’époque. Il innove aussi bien techniquement (rayogrammes, solarisation, surimpression, photomontages etc…) qu’esthétiquement (compositions, recadrage, jeux d’ombres et de lumière) et applique à la mode ses recettes subversives et poétiques, chères à l’esprit Dada.
Man Ray, le rebelle évolue ainsi dans un monde de beautiful people aussi bien coté artistes, couturiers que clients de grandes maisons de couture. Tout au long de l’exposition, on croise ainsi des personnages célèbres comme Kiki (qui fut sa compagne) ou Coco Chanel (dont il fit un portrait qui est devenu iconique). D’autres photographies de mode comme « visage de nacre et masque d’ébène » sont devenues des grands classiques de l’ œuvre photographique du vingtième siècle et furent considérées à l’époque comme tout à fait novatrices.
Man Ray s’est également essayé à la publicité. Les photographies « L’œil » et les « Larmes », devenues l’un des emblèmes de la photographie surréaliste étaient à l’origine destinées à illustrer une publicité pour le mascara accompagnées du slogan : « Pleurez au cinéma/ pleurez au théâtre/ riez aux larmes sans crainte pour vos yeux».
On peut probablement affirmer sans se tromper que Man ray aimait les femmes, leur corps, leurs courbes et qu’apparemment elles le lui rendaient bien. On croise tout au long de l’exposition bon nombre de ses compagnes mais également des femmes qui ont joué un rôle majeur dans sa carrière et dans l’évolution de son style. Elsa Schiaparelli est une figure prépondérante de son œuvre. Elle était une des rares créatrices de mode à comprendre le surréalisme. Quant à Lee Miller, elle fut à la fois modèle, assistante et compagne de Man Ray et participa à l’évolution stylistique du photographe.
Un passage par le Château Borely vous permettra de vous plonger dans la mode photographiée par Man Ray. Les modèles exposés sont spectaculaires et emblématiques du renouveau vestimentaire. Coupes, coiffures, lingerie, accessoires sont ainsi passés au peigne afin d’illustrer l’interaction entre le photographe et les modèles de l’époque. Man Ray voulait lier l’art à la mode, ces deux expositions complémentaires en sont la démonstration absolue!
On quitte ces expositions avec deux sentiments presque contradictoires. D’un coté la nostalgie de cette mode si raffinée crée par des noms mythiques et d’autre part, un sentiment de modernité, comme si Man Ray avait sonné le glas d’un nouvel esthétique indémodable. Un dernier petit conseil pour la route, n’oubliez surtout pas vos lunettes car les photographies exposées sont de petite taille!
Le Petit Plus : Des visites guidées sont organisées régulièrement si vous souhaitez être accompagnés dans votre visite.
Par Nathalie Boscq