Un pseudo anglais, des racines autrichiennes mais un projet musical bien français. Depuis qu’il est installé à Marseille, Charles Sinz, chanteur et multi-instrumentiste révèle tout son talent d’auteur, de chanteur et de compositeur.
Nous l’avions rencontré pour la première fois sur un bateau, au large de Marseille, sévèrement chahuté par les flots. Alors que beaucoup peinaient à ne pas renverser leur mojito sur le dancefloor mouvant, lui parvenait tant bien que mal à chanter, jouer du clavier et de la guitare. Entre Daho et Flavien Berger pour la voix ou encore M83 pour les nappes synthétiques, nous voyions déjà poindre le talent du jeune homme à travers cette électro-pop très cinématique. Nous le retrouvons chez lui dans un univers beaucoup plus calme (n’était-ce les marteaux-piqueurs du chantier voisin) au moment où sort son nouvel EP baptisé « Portamento ». Le communiqué de presse nous apprend – on dormira moins bête – qu’il s’agit d’un terme musical d’origine italienne, désignant un glissement vocal d’une hauteur de note à une autre. Les 5 titres seront complétés à l’avenir par d’autres, mais les premiers comme « des Nuits comme ça » résonnent déjà comme les possibles hits d’un torride été marseillais.
Comment es-tu arrivé à la musique et au chant ?
J’ai toujours été fou de musique, c’est quelque chose mes parents et grands-parents m’ont transmis. J’ai débuté la guitare au lycée et au même moment, j’ai commencé à bricoler des morceaux sur mon ordinateur. J’ai eu mes premiers groupes de musique pendant mes années d’études à Grenoble (Quai d’Orsay notamment), entre rock et britpop. Après un passage de 6 mois à Londres pour un stage, je suis complètement tombé dans la musique électronique et à mon retour en France j’ai commencé à mixer. Le projet Since Charles est né autour de 2020 / 2021 après mon installation à Marseille, je commençais à accumuler des morceaux et le confinement m’a permis d’aller au bout de ces idées.
Être seul plutôt qu’en groupe était-il un choix délibéré ?
C’est un choix complètement délibéré ! Après avoir fait partie de plusieurs groupes en tant que guitariste ou chanteur, j’avais très envie de lancer mon propre projet et proposer une musique qui me ressemble à 100% et dont je maîtrise tous les aspects. Aujourd’hui, je commence à me dire que j’aimerai peut-être inviter d’autres musicien.nes à m’accompagner sur scène.
Tu es signé par IN/EX, le label de Grand Bonheur ? Raconte-nous cette rencontre avec cette coopérative musicale et les rencontres avec les autres artistes ?
J’ai d’abord côtoyé la team Grand Bonheur en tant que chargé de communication puis programmateur du Parcours Chanson du festival Avec le Temps. C’est un peu ma famille professionnelle de cœur.
Bon nombre d’artistes du label m’ont accompagné sur le lancement du projet Since Charles. Je pense à Martin Mey qui m’a donné plusieurs cours de chant ou encore à Fred Nevché qui m’a aidé à faire sortir les premiers textes. Il y a aussi Simon (French 79) pour qui j’ai fait pas mal de premières parties !
En novembre dernier, tu as fait la première partie du Noiseur à L’Olympia ? Ça fait quoi de monter sur cette scène mythique ?
C’était un moment assez magique, hors du temps et je pense que le lieu y est effectivement pour beaucoup. Le son, la lumière, la proximité avec les gens, les balcons, je me suis senti porté. C’est un magnifique cadeau que m’a fait Simon (Le Noiseur) !
Quels sont les artistes qui t’inspirent le plus actuellement dans la nouvelle scène française ?
J’aime beaucoup la scène francophone Québéquoise qui commence à se produire pas mal en France. Je pense aux Louanges, à Hubert Lenoir, Narcisse ou encore Bibi Club. Ils.elles ont une approche complètement libre et décomplexée de la musique, ce qui rend leurs morceaux d’autant plus sensibles et touchants.
Côté Hexagone, j’aime beaucoup le groupe En Attendant Ana qui vient de sortir un magnifique album, le duo UTO, Claude… Je suis aussi très attentif à la scène Marseillaise, je suis de près des artistes / groupes / labels / collectifs comme Janela, Caïn و Muchi, Bonnies House, Omer, Antonin Appaix etc.
Tu accordes beaucoup d’importance à l’image. Est-ce toi qui donne tes idées au réalisateur de tes clips ou leur laisses-tu carte blanche ?
Depuis mon premier EP Sans raison, j’ai pris l’habitude de donner carte blanche à la personne qui réalise les clips. C’est un premier lâcher prise avec les morceaux pour moi et aussi une manière de les enrichir d’une autre vision, d’une autre histoire. Que ce soit avec Flora Aussant pour mon premier opus ou avec Théo Sixou pour mon second EP Portamento, j’ai toujours été très content du résultat.
Tu casses un peu les clichés sur Marseille. A la place de la mer et des lumières vives, on découvre plutôt des décors très urbains et assez sombres… Pourquoi cette envie ?
Cela vient d’une part de mon amour pour l’architecture brutaliste, fonctionnaliste, pour la géométrie et le béton ! D’autre part, en tant qu’artiste je ne souhaite pas mettre en avant la carte « Marseille » et les clichés qui vont avec.
J’aime ma ville et je préfère la mettre en avant en pointant ses aspérités, ce qui la rend unique. Je trouve que Théo Sixou, le réalisateur des clips de Portamento, a très bien réussi à faire cela !
Portamento ton dernier EP parle beaucoup de l’adolescence ? Comment était la tienne et en gardes-tu la nostalgie ?
Il parle d’adolescence en effet mais pas forcément comme le passage de l’enfance à l’âge adulte. C’est un disque qui métaphorise le changement du corps et de l’esprit, la transformation, le glissement d’un état à un autre. À travers les années, on change, on évolue, on se construit, quand on jette un regard en arrière, on s’aperçoit qu’aujourd’hui on n’est pas la même personne que l’on était hier. C’est précisément de ça dont parle Portamento, même si plusieurs morceaux vont puiser dans mes souvenirs d’enfant et d’adolescent. J’ai grandi dans un petit village au nord de l’Ardèche (Saint-Agrève / 2500 habitants) en rêvant d’ailleurs, de grande ville et des projecteurs. C’est pourtant dans ce même village que je suis revenu enregistrer mon dernier EP.
La release party de l’album aura lieu le 5 avril sur la péniche Le Mazette à Paris. La Capitale reste le passage incontournable pour faire parler de soi en tant que musicien ?
C’est en effet un passage incontournable qui permet de donner de la visibilité au projet aussi bien au niveau public que professionnel.
Les adresses où tu aimes bien traîner à Marseille ?
En tant qu’habitant du quartier des Réformés, vous pourrez très certainement me croiser dans une de ces adresses :
- Dizonord – Le meilleur Disquaire de la cité Phocéenne, on vient pour acheter un disque, on repart avec une montre Denver.
- Au Pied de poule – Friperie dans laquelle j’ai trouvé pas mal de mes tenues de scène. On est sûr de la qualité et le vendeur est toujours de bon conseil.
- Robato Ramen – C’est le dernier ramen en date dans lequel j’ai mangé à Marseille et il était vraiment excellent, je recommande.
Propos recueillis par Eric Foucher / Photos E.F (portrait) et IGO studio (promo EP)