« Une dragée, c’est une amande qui a réussi » se plaît à dire Ivan Dumon qui a repris l’illustre fabrique Rosière, à Marseille depuis 1924. En l’habillant au goût du jour, il souhaite en faire un rituel gourmand du quotidien et non plus la consacrer aux seules fêtes religieuses.
Les origines de cette petite douceur remontent au début du siècle dernier quand un couple d’épicier-confiseur d’Ankara d’origine arménienne, les Adjemian, fuient les persécutions turques pour venir s’installer dans le quartier de Beaumont. Ils y fabriquent des loukoums, sucettes ou autres sucres d’orges dès 1924. Mais ce n’est qu’après-guerre que la société connaît son heure de gloire avec le baby-boom. Flairant le bon filon, la deuxième génération de la famille crée la recette de la fameuse dragée Rosière pour répondre à la demande qui explose en raison des très nombreux mariages, baptêmes et autres communions.
70 ans plus tard la recette de la dragée, qui a été rebaptisée Philomène en hommage à l’épouse du fondateur Agope, est toujours la même : Une amande Avola (du nom de ce petit village de Sicile) considérée par les spécialistes du genre comme la meilleure du monde, en petit calibre (princesse) avec une petite dose de vanille de Madagascar et recouverte d’une fine couche de sucre.
C’est pour celle-ci que des générations entières de marseillais traversent la ville en direction du village de Saint julien pour retrouver le goût de leur enfance. La confiserie n’embaume malheureusement plus le village et a perdu son outil de production au début des années 2000. Rassurez-vous, les dragées restent fort heureusement produites en Alsace. Ne subsiste sur place que la boutique et le service pour les commandes sur mesure avec une incroyable collection de présentoirs en rotin peint en blanc (voitures, carrosses, ferry-boats et animaux féeriques).
Ivan Dumon, l’entrepreneur a racheté la marque ( également à la tête d’une association de repreneurs d’entreprise aux savoir-faire d’excellence ) a eu à cœur de préserver cette petite merveille blanche tout en tentant de désacraliser quelque peu son mode de consommation. Depuis des lustres elles sont en effet offertes aux mariées, souvent par cinq pour les cinq souhaits associés aux unions : fécondité, santé, félicité, prospérité et longévité.
La tradition perdurent aujourd’hui mais davantage comme signe raffinement à la française. Il s’agit maintenant avec des nouveaux parfums (à la pâte de fruits, guimauve ou au chocolat) de compléter l’offre pour en faire une sucrerie à consommer plus régulièrement. Le packaging revu aux goûts du jour comme ces jolies boites de dragettes colorées à glisser au fond du sac fait partie aussi de la nouvelle entreprise de séduction. Avec son nouveau positionnement, Rosière entend tenir la dragée haute aux sucreries bas de gamme.
Par Eric Foucher