Gaspard est un drôle d’oiseau de nuit. A mi-chemin entre le tripot clandestin et le bar d’hôtel chic, on s’y délecte des cocktails de haut vol savamment réalisés par des cadors de la mixologie.
Cela fait déjà un moment que l’esprit tiki faisait les beaux jours des pages déco des magazines. A Marseille, il était encore rare. Mais Annick et Ingrid Lestrohan (Honoré) a qui l’on doit le ramage de Gaspard ne se sont pas contentées de faire un décalque des tendances tropicales du moment. A côté des classiques du genre (chaises en rotin, tapisserie à motif végétal et autres oiseaux et poissons exotiques) une magnifique peinture à l’éponge bleue comme l’azur, des suspensions telles des nasses de pêche ou bien encore des cordages pour la rampe d’escaliers nous rappelle bien le port d’attache de ce nouveau bar à cocktails. Dans une région baignée de lumière et saturée de couleurs, il porte si bien le noir l’animal qu’il pique immédiatement votre curiosité.
Pour une immersion parfaite dans une ambiance speakeasy, à la terrasse et jolie petite salle de l’étage où l’on est vite esquiché, préférez le comptoir du rez-de-chaussée. Sous les hauts plafonds à l’éclairage tamisé, derrière les stores vénitiens, c’est sur le long comptoir que la magie opère. Les yeux baladeurs tentent de déchiffrer les étiquettes d’alcools rares (vodka, gin, rhum, tequila et whisky en mode premium) puis restent hypnotisés par les gestes précis de Ben et Léon, les maestro du shaker.
Il s’agit bien d’un art que cet assemblage subtil d’alcools, de fruits et d’épices qui se déroule sous vos yeux. Les effluves délicates du sésame grillé, l’arôme de la fève de Tonka et le goût des agrumes vous donnent l’impression de n’avoir jamais goûté à un Maï Taï. Idem pour le Pisco flower à la douce amertume. Mais c’est la création maison « Ta mère aux Baumettes » aux fruits rouges, vanille, vodka, menthe allongé au soda gingembre qui en émoustillera plus d’un(e). On le savoure, on le déguste, on ne boude pas son plaisir. L’expression « siroter un cocktail » prend ici tout son sens d’autant qu’il est servi dans de très beaux verres. Une petite faim ? Des petites assiettes sont proposées au grignotage et au partage. Là encore que des assemblages de produits frais et des saison parfois improbables comme autant de délicieuses surprises pour les gourmets. Si la Relève était le spot de l’apéro, la nouvelle adresse d’Edouard Giribone & Grégoire Hessmann est indéniablement celle des soirées épicées. (EF)