« AMO » comme « j’aime » pour Luciana Amado, jeune cheffe colombienne, solaire comme sa cantine. Elle a décidé d’inviter tous les deux mois des chefs inspirés et de vous recevoir comme elle aimerait être reçue, pour une délicieuse parenthèse culinaire.
En investissant un garage devenu par la suite atelier d’artiste dans le haut de la rue sainte, Luciana Amado savait qu’elle tenait là une bonne adresse pour laisser enfin libre court à ses envies entrepreneuriales et créatrices. Car si le nomadisme a ses vertus, posséder une base arrière est également important pour poser de solides bases à un projet.
A la tête pendant huit ans d’un restaurant à Paris baptisé « Lula », la jeune femme originaire de Bogota a décidé après le confinement de revenir vers ce soleil qui lui manquait tant.
Et pour se familiariser avec la scène gastronomique locale, quoi de mieux que des pop-up culinaires qui ont fait florès ces dernières années. En participant à une résidence de chef chez Aussih, elle se prend au jeu de cette tendance nomade. Elle co-organise ensuite un circuit culinaire avec Camille Lhomme dans plusieurs tables à la Ciotat, puis d’autres petits événements mêlant parfois des concepts artistiques à la cuisine.
Son pop-up culinaire d’un trimestre l’an passé dans la jolie cour d’un établissement voisin (A Little Family) fut le dernier galop d’essai avant de se lancer dans le grand bain de l’entrepreunariat.
L’expression « cuisine solaire » qui s‘affiche sur la devanture n’a rien à voir avec de panneaux qui seraient posés sur le toit ou une quelconque technique de cuisson. Elle traduit la bonne énergie que Luciana et son équipe souhaitent de distiller dans le lieu.
« Par mes origines et mon histoire, j’ai toujours eu ce souci de l’accueil. Pour moi, le restaurant est une expérience, comme un rituel. On s’installe, on est servi et on prend son temps. Les gens font un effort financier pour passer un bon moment. Alors on se doit de bien les accueillir. »
Chez AMO, Luciana enfile en effet la casquette de pilote ou de cheffe d’orchestre. Elle sélectionne tous les deux mois un nouveau chef qui devra travailler avec l’équipe permanente. Cette dernière s’occupe de toute la logistique et des approvisionnements afin qu’il puisse se concentrer sur la cuisine.
« Ils peuvent proposer librement une carte, avec pour seuls impératifs d’utiliser des produits de saisons et locaux permettant de rentrer dans une gamme de prix raisonnable. »
Les ingrédients des plats s’ajouteront à d’autres fournisseurs locaux avec lesquels Luciana aime travailler : le pain de chez T65, les vins natures de l’Abri, les fromages de la Laiterie marseillaise ou les Fleurs de Marseille de Marie-Laure Wavelet.
« Je n’invite pas les chefs d’après leur CV. Je serai même tenté de dire que je préfère donner leur chance à ceux que l’on n’a pas encore trop vus. »
Paolo Santiago, le premier invité, est un chef Italo-péruvien qui vient tout juste de s’installer à Marseille. Il vient gonfler les rangs d’une filière sud-américaine très en verve à Marseille et qui a enrichi la gastronomie locale de nouvelles saveurs. « Il a voyagé et travaillé partout. Il est imprégné de tant de cultures que cela se traduit dans ses recettes par un côté insaisissable ».
Ce midi-là, il nous a régalé en entrée avec des asperges, jaune d’œuf fumé, épeautre soufflé, kumquat; en plat d’un thon fumé dans un nid d’épinards et câpres ; en dessert (et un cran en dessous) avec une petite tarte citron estragon-kiwi, néanmoins très goûteuse.
Après lui, c’est Marion Château jeune cheffe marseillaise passée par Safran et la Cantine de Jogging au parcours complètement différent qui reprendra les fourneaux. C’est une exploration infinie.
Vous l’aurez compris, difficile de vous recommander AMO pour une cuisine particulière puisqu’elle changera tous les deux mois. C’est plutôt pour l’atmosphère, l’expérience et la curiosité que vous serez, on l’espère, intéressés d’y aller déjeuner et dîner, dans une jolie salle habillé des fresques tout en rondeur de l’artiste Franck Lebraly (que nous vous avions déjà présenté il y a quelques années).
Le Petit Plus : A l’entrée du restaurant sont exposés des tirages des photographes amenés, eux aussi, à changer régulièrement. Actuellement Cédric Roux et Pierre Belhassen d’Atlas images.
Par Eric Foucher / Texte et photos