Chaque année Foresta, parc métropolitain en devenir, réserve de nouvelles surprises. Aux citadins en manque de grands espaces, il offre 16 ha de nature sauvage et un panorama à couper le souffle.
Régulièrement nous nous rendons sur ce terrain en jachère promis à devenir une vaste coulée verte dans un secteur qui en manque tant. Situées entre les quartiers de la Viste et Saint Antoine, ces collines sont les remblais de la construction du centre commercial Grand Littoral, au cœur des quartiers Nord à Marseille.
Longtemps à l’abandon car coincées entre entrepôts portuaires, zones commerciales et grands axes routiers, elles sont depuis quelques années le terrain de jeu d’un projet aussi ambitieux que nécessaire : transformer étapes par étapes l’espace en un parc urbain tourné vers la biodiversité.
Après des années de discussions entre deux nombreuses associations impliquées à sa transformation (Hôtel du Nord, le collectif Safi, le Bureau des guides du GR2013, les riverains, etc.) le processus de transformation s’est accéléré depuis deux ans avec la signature d’une convention d’occupation de huit ans entre l’association Yes We Camp et le propriétaire des lieux (la société Résiliance). Un accord qui permis de débloquer des fonds européens (Feder) et d’envisager un développement concerté et par strates du site. Après le débroussaillage du site par les ânes, nous voulions découvrir les nouvelles trames se dessinant sous les lettres géantes indiquant l’entrée dans Marseille.
Depuis le boulevard d’Hanoï et le belvédère de la Viste offrant un panorama inégalé sur le Port autonome, nous dévalons donc les chemins de la colline envahie de fleurs et d’herbes folles. Sur la gauche, on peut se perdre dans des petits sentiers rejoignant le parc Brégante. Une fraîcheur bienvenue dans les sous-bois avant d’attaquer des steppes plus arides à droite menant vers le « hameau ». Cette base de vie faite de bois et de torchis a été construite pour accueillir les équipes d’encadrement mais aussi les structures en résidence. Un précieux mélange collectifs d’aide à l’intégration de personnes défavorisées et de projets entrepreneuriaux tournés vers le développement durable.
L’électricité et l’eau courante enfin sur site ont permis d’installer les bureaux, une grande cuisine ouverte sous une pergola et même une douche extérieure en bois et bambou pour les équipes et les résidents travaillant sur place, en plein cagnard l’été. Parmi eux nous croisons Gauthier Oddo, architecte, en train de dessiner les plans d’emprise au sol où sera coulée cette année la dalle qui accueillera une grande halle. Un bâti qui symbolisera véritablement l’an prochain l’accueil des publics et des porteurs de projets tournés vers les activités de plein air. Les installations ludiques et sportives vont elles aussi se développer à l’instar de ce petit ring de plein air fabriqué par le Construct Lab avec des jeunes du Corsaire Boxing de la Castellane qui vient déjà de voir le jour et sur lequel ils sont déjà nombreux à venir se défouler.
Mais la grande nouveauté cette année, c’est l’installation d’un ranch ouvert tous les jours. Ce petit centre équestre est géré et animé par la sympathique famille Karamane (Chadly et son fils Mehdi). Il propose des balades à poneys ou cheval. Les petits pourront aussi un découvrir des chèvres qui servent à l’entretien des lieux. Les amateurs de design et d’architecture iront eux visiter le très réussi pavillon dessiné par Arnaud Sarteur (AStudio), un module d’habitat léger baptisé « Station C.I.E.L » qui sera utilisé in situ pour des réunions et des ateliers.
Le no man’s land reprend vie année après années. Il était autrefois la propriété du marquis de Foresta (d’où est tiré le nom du lieu) qui y avait son château détruit durant la seconde guerre mondiale mais il ne s’agit plus là de retrouver son passé noble. Plutôt renouer avec son histoire industrieuse et populaire. Après l’agriculture et la vigne, les terres argileuses du site alimentaient les tuileries du bassin de Séon. Très lié à l’histoire industrielle et populaire du site, Foresta essaie de valoriser, par différents moyens, cette mémoire si importante pour de nombreux habitants. Travailler avec la terre du site – isolation terre-paille du petit hameau, fabrication de four en terre en partenariat avec la Gare Franche et la Tuilerie Monier – fait ainsi partie des premières applications concrètes.
Tourné vers la mer, Foresta est une aire récréative collective, un poumon vert qui permet de préfigurer une nouvelle façon d’utiliser les espaces vacants pour tous et par tous. A l’aune de ce que nous venons de traverser, ce type de projet semble plus que jamais nécessaire et d’actualité.
Par Eric Foucher
>> Accès à pied depuis le centre commercial Grand Littoral ou par l’avenue de La Viste au 20 bd de Hanoï 13015 Marseille