Les deux ne font pas la paire mais plutôt une, comme leur vase iconique Jules et Jim unis à la vie à l’amour. France et Caroline se fondent en Franca, jolie marque de céramiques qui fait vibrer les terres de Provence.
Qui se ressemble s’assemble dit le dicton. Mais n’étaient-ce leurs origines corses, ces deux-là sont pourtant très différentes. Presque une génération les sépare et des goûts bien à elles. C’est ce qui les rend si complémentaires et les fait apprendre l’une de l’autre déclarent-elle dans un discours bien rôdé. Normal, les deux sont des communicantes. Comme beaucoup en ce moment, elles ont éprouvé le besoin de quitter claviers et écrans pour mettre les mains à la pâte, faite de terres mêlées du sud. Beaucoup en parlent, elles l’ont fait. L’association de France et Caroline a donné naissance une jolie marque de céramique, Franca, qui verse dans l’usuel comme dans le décoratif.
Un ami commun, l’architecte François Champsaur, les convainc un jour de franchir le pas et transformer l’essai. En leur offrant des cours de céramiques chez sa mère (Maggy Champsaur, céramiste de renom installée rue Neuve sainte Catherine à Marseille) il fait mouche. Les six cours initiaux se transforment en un an de pratique assidue aux côtés de celle qui deviendra leur mentor, le coup de foudre impulsif un choix raisonné.
Durant deux ans, les deux alternent les formations et les stages chez les confrères (le Potier Marseillais, Monochromic) pour peaufiner leurs techniques et faire émerger leur style propre. La première commande tombe un jour et avec elle l’envie de la signer. Franca est né et s’affiche sur les premières assiettes, celles du Café Bohème de Hyères et leur discrète emprunte façon napperon. Suivront les « impatientes », des assiettes en terre blanche et oxyde vert pour une le restaurant La Bottega la Bonne Mère et un service en grès blanc orné du fameux bouton emblème d’une autre table bien connue de Marseille, la Mercerie.
Les goûts s’affinent, se complètent et le dialogue s’installe avec les futurs clients recrutés via leur compte Instagram sur lequel elles postent leur proto. Les commandes s’enchaînent et avec elles la nécessité de rationaliser leur artisanat sans perdre leur âme. Ce sera à Saint Just, dans petit atelier situé dans d’anciens entrepôts de famille prêté par Numa Gortan, architecte et trésorier de la villa Noailles à Hyères, mais surtout amoureux mécène de France Bocognani. Une table à dessin, un four et un petit showroom, là s’imagine et se crée chaque pièce. Les inspirations viennent clairement de la Riviera des années 50 à 70, celles des poètes, peintres et grands céramistes dont on retrouve l’empreinte dans les assiettes décoratives, les formes organiques, les couleurs naturelles. Funghi (vases), Faccia (assiettes peintes de visages) et barbotines (assiettes décoratives ornées de coquillages) autant de créations mûrement réfléchies ou fruits d’une poétique sérendipité s’alignent sur les étagères en attendant de trouver place dans des intérieurs. Comme un enfant qu’on accompagne vers l’émancipation, elles n’aiment rien tant qu’aller livrer leurs créations et les voir vivre chez les autres. Et quand les autres ont des intérieurs flatteurs, on découvre enfin l’objet sous son meilleur jour.
> Allez faire un tour sur leur compte Instagram pour découvrir leurs jolies créations en situation.
Par Eric Foucher